Rien ne t’appartient, Nathacha Appanah, Gallimard, août 2021, 159 pages.
Tara ou Vijaya ? Elle est l’une, celle qui a perdu son mari et qui s’en remet difficilement. Elle est l’autre, celle qui voit ce garçon partout, celle qui s’est retrouvée dans un coffre pour échapper au massacre, celle qui est passée de « chien méchant » à « fille gâchée », celle qui pourtant aimait rire, danser, insouciante.
Dans un pays jamais cité mais qui ressemble fort au Sri Lanka, Nathacha Appanah nous offre l’histoire de cette jeune fille puis jeune femme, meurtrie, abîmée et qui déploie une énergie hors du commun pour vivre.
Dans une langue poétique, avec le minimum de mots, l’auteure nous plonge d’emblée dans une atmosphère lourde, pesante et en même temps emprunte d’une grande douceur. D’une première partie nébuleuse et obscure, le lecteur sort groggy. La seconde partie donnera une consistance au passé fantomatique de la jeune femme, mais avec subtilité.
Ce roman est d’une sensualité et d’une douceur qui n’ont d’égale que la violence qui transpire de chaque page, une violence jamais exploitée, jamais criée à la face du monde, une violence à peine esquissée et pourtant si présente, violence qui efface bien vite quelques images colorées, douces et légères.
Ce livre enferme en lui une gamme d’émotions incroyable, sa réussite tient entièrement dans le fait que l’auteure suggère tout sans explication, au lecteur de deviner, de comprendre, de ressentir. Ça, c’est de la littérature !