Barry Windsor-Smith est un artiste aussi rare que talentueux. Cela faisait bien longtemps que nous n'avions plus de nouvelles véritables de ce grand maître de la bande dessinée américaine; il est de retour cette année avec Monstres, un ouvrage colossal publié aux éditions Delcourt. Cette histoire à beaucoup mijoté et il a fallu des lustres pour enfin aboutir au résultat définitif. Force est de constater que le jeu en valait la chandelle, l'attente est récompensée avec ce chef-d'œuvre de narration, qui place au cœur du récit la figure du monstre. Qu'il ne faut pas uniquement interpréter en tant que disgrâce physique, mais aussi manifestations de l'inhumanité et de la perversion qui résident en certains d'entre nous. Composé d'environ 360 pages, Monstres présente l'histoire d'une recrue de l'armée américaine qui se retrouve impliquée dans une expérience militaire secrète, initiée par les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale. Un sergent tente bien de protéger les victimes de cette expérience, mais trouve toute une série de monstres sur son passage, au propre comme au figuré. La victime, c'est Bob Baley, un jeune homme au passé trouble, sans papiers d'identité, qui se présente au bureau de recrutement militaire avec l'espoir de servir son pays. On pense à un Steve Rogers taiseux et lunaire, mais ici point de sérum du super soldat et de grand destin, ce qui attend l'infortuné volontaire, c'est le projet Prométhée, qui a plus à voir avec la torture, les délires eugénistes du docteur Mengele, qu'avec la science proprement dite. Sa transformation sera radicale, et il deviendra un monstre. Difforme, énorme, mais aussi doté d'une force surhumaine, lui qui n'a plus grand chose d'humain, en définitive. La scène de l'évasion n'est pas non plus sans faire écho au célèbre Arme X qui place Wolverine dans une situation assez similaire; là aussi le pathos et le drame sont omniprésents, et la créature est prise en chasse, dans une optique de destruction. En fait, pour tout comprendre, il faut patienter. Les premières scènes de l'enfance de Bob, avec une maltraitance paternelle évidente, et des bulles de paroles austères en ce qui semble de l'allemand, trouvent une explication au fil des pages, qui font fi de toute idée de narration linéaire. On remonte le temps, repart de l'avant, rembobine à nouveau, et le processus dévoile, couche après couche, les motivations, les plis de l'histoire, les moments clés, de ce qui va être une tragédie, et un énorme gâchis.
Monstres : le retour monstrueusement poignant de barry windsor-smith
Par Universcomics @JosemanietteBarry Windsor-Smith est un artiste aussi rare que talentueux. Cela faisait bien longtemps que nous n'avions plus de nouvelles véritables de ce grand maître de la bande dessinée américaine; il est de retour cette année avec Monstres, un ouvrage colossal publié aux éditions Delcourt. Cette histoire à beaucoup mijoté et il a fallu des lustres pour enfin aboutir au résultat définitif. Force est de constater que le jeu en valait la chandelle, l'attente est récompensée avec ce chef-d'œuvre de narration, qui place au cœur du récit la figure du monstre. Qu'il ne faut pas uniquement interpréter en tant que disgrâce physique, mais aussi manifestations de l'inhumanité et de la perversion qui résident en certains d'entre nous. Composé d'environ 360 pages, Monstres présente l'histoire d'une recrue de l'armée américaine qui se retrouve impliquée dans une expérience militaire secrète, initiée par les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale. Un sergent tente bien de protéger les victimes de cette expérience, mais trouve toute une série de monstres sur son passage, au propre comme au figuré. La victime, c'est Bob Baley, un jeune homme au passé trouble, sans papiers d'identité, qui se présente au bureau de recrutement militaire avec l'espoir de servir son pays. On pense à un Steve Rogers taiseux et lunaire, mais ici point de sérum du super soldat et de grand destin, ce qui attend l'infortuné volontaire, c'est le projet Prométhée, qui a plus à voir avec la torture, les délires eugénistes du docteur Mengele, qu'avec la science proprement dite. Sa transformation sera radicale, et il deviendra un monstre. Difforme, énorme, mais aussi doté d'une force surhumaine, lui qui n'a plus grand chose d'humain, en définitive. La scène de l'évasion n'est pas non plus sans faire écho au célèbre Arme X qui place Wolverine dans une situation assez similaire; là aussi le pathos et le drame sont omniprésents, et la créature est prise en chasse, dans une optique de destruction. En fait, pour tout comprendre, il faut patienter. Les premières scènes de l'enfance de Bob, avec une maltraitance paternelle évidente, et des bulles de paroles austères en ce qui semble de l'allemand, trouvent une explication au fil des pages, qui font fi de toute idée de narration linéaire. On remonte le temps, repart de l'avant, rembobine à nouveau, et le processus dévoile, couche après couche, les motivations, les plis de l'histoire, les moments clés, de ce qui va être une tragédie, et un énorme gâchis.