Les éternels de gillen et ribic : seule la mort est éternelle
Par Universcomics
@Josemaniette
Par définition, s'ils sont éternels, c'est qu'ils ne peuvent pas vraiment mourir. C'est probablement la raison pour laquelle, au lieu d'êtres humains normaux, ils passent pour être des dieux aux yeux de tous; mais comme le rappelle Ikaris, le plus puissant d'entre eux, à plusieurs reprises, non, les Eternels dans cette incarnation sont plus des entités extraterrestres d'apparence humaine aux pouvoirs formidables. En réalité, lorsqu'un membre du groupe meurt, il finit par être ressuscité par une sorte de matrice. Une pratique assez récurrente chez Marvel, une constante même puisque chez les mutants aussi le décès n'est plus définitif. C'est d'ailleurs quelque chose qui peut s'avérer très gênant à la longue, car comment vibrer pour des personnages qui même lorsqu'ils se sacrifient, ont l'assurance de revenir juste derrière? Bref nous assistons dès les premières pages à la renaissance de Ikaris; c'est ensuite au tour de Sprite d'entrer en scène, ce personnage aussi espiègle qu'irritant. Kieron Gillen parvient très rapidement à poser les principaux pions sur la table, sans perdre les lecteurs qui sont entrés dans la danse uniquement grâce au récent film. Il est possible de tout comprendre des enjeux, d'autant plus qu'il recourt à un artifice dont Jonathan Hickman (toujours les X-Men) use et abuse à longueur d'épisodes, un savoir des pages "infographiques" où il est possible d'en savoir plus sur l'histoire et la géographie des Eternals. L'action commence vraiment lorsqu'un meurtre est commis dans la communauté. Un vrai (Zuras), sans retour possible. Les soupçons se tournent assez rapidement vers Sprite mais finalement c'est Ikaris qui va mener l'enquête, notamment dans la cité de Titanos, aujourd'hui totalement abandonnée, autrefois capitale des Eternels. Là-bas notre héros va faire une bien mauvaise rencontre puisque c'est Thanos en personne qui l'attend dans les décombres, et lui inflige une rouste mémorable, dont il est sauvé d'extrême justesse. Problème: si l'assassin recherché est réellement Thanos, comment expliquer qu'il ait pu emprunter les canaux d'accès et de sortie à la cité des Eternels, sachant qu'il n'en n'est pas vraiment un lui-même? Tout cela sent la traîtrise à plein nez.Le point positif de cet album, c'est le fait que le scénariste parvienne à étoffer considérablement l'univers des Eternels, à le structurer, lui ouvrir de nouvelles pistes pour les années à venir, tout en modifiant le statut de ces personnages, comme à vouloir bien signifier à quel point ils sont singuliers et à quelle niveau il va falloir innover pour leur trouver une place de choix, qui ne soit pas redondante par rapport à tout ce qui existe déjà chez la Maison des idées. Du coup le point négatif c'est que certains éléments du récit nécessitent une connaissance de ces héros pour être pleinement appréciés, d'autant plus que Gillen parsème le tout de nombreuses touches d'humour, qui peuvent ne pas toujours paraître à propos. Néanmoins le cahier des charges est rempli, avec les Eternels, les Déviants, une caractérisation des personnages qui s'intéresse à tour de rôle à chacun des principaux intervenants, sans oublier Thanos en tant que grand méchant, qui réserve lui aussi une surprise. Le dessin est de Esad Ribic, qui est plus à considérer comme une sorte de peintre onirique qu'un dessinateur classique de super-héros. Demandez-lui de mettre de la poésie, du charme, du dynamisme à travers ses planches et vous allez être servis; par contre par endroits il faut bien admettre que son trait n'est pas des plus gracieux. Sur les réseaux, on a lynché par exemple un certain Romita Jr pour des visages et des physionomies qui ressemblent tout de même beaucoup à ce que l'on voit ici (dans les gros plans). Il ne faut donc pas aller chercher dans le détail le meilleur de sa prestation, mais plutôt en humer l'atmosphère globale, celle qui se dégage de son travail. Cette nouvelle époque des Eternels au format comics envisage clairement de lancer le récit vers de nouvelles pistes, et c'est quelque chose qu'il faut louer, mais cette manière un peu ironique et postmoderne de vouloir désacraliser à tout prix celles et ceux qui autrefois étaient considérés comme des créatures divines, peut aussi se révéler une opération casse-gueule. A charge pour le scénariste d'avoir de belles cartouches en réserve pour nous surprendre dans les mois à venir. En attendant cette édition chez Panini est soignée, attrayante et fortement recommandable.
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