Editeur : Monsieur Toussaint Louverture
Nombre de pages : 335
Résumé : Ses brillantes études universitaires terminées, Anne Shirley se voit confier la direction du lycée de Summerside, une petite bourgade de l’Île-du-Prince-Édouard, d’apparence paisible, mais qui va lui réserver bien des surprises. Livrée à elle-même dans une ville où elle ne connaît personne, Anne est loin des nids douillets entourés d’âmes sœurs qu’étaient Green Gables et Kingsport. Néanmoins, avec son esprit toujours aussi romantique, espiègle – parfois même piquant ! – et bienveillant, elle sait aimer et se faire aimer, appréhender les situations les plus cocasses et les sublimer.
- Un petit extrait -- Mon avis sur le livre -« Gilbert chéri, n'ayons jamais peur de rien. C'est un terrible esclavage. Soyons audacieux et aventureux et impatients. Dansons a la rencontre de la vie et de tout ce qu'elle peut nous apporter, même s'il s'agit d'une montagne de problèmes et de la typhoïde et de jumeaux ! »
Que la vie serait douce et paisible si les mésaventures n’arrivaient qu’aux personnages de films ou de romans ! Mais sans doute serait-elle aussi bien ennuyeuse, sans quelques soubresauts pour briser le morne quotidien ! Toujours est-il que je me serai bien volontiers passée de cette ô combien terrifiante tribulation ... Figurez-vous que, folle d’impatience que j’étais, j’ai passé ma précommande pour ce tome le plus tôt possible, pour être absolument certaine de le recevoir le plus rapidement possible (car une journée sans Anne est une journée sans soleil). Et figurez-vous que, tandis que mes amies recevaient les unes après les autres leurs colis, y compris celles qui n’avait commandé que la veille (soit des semaines et des semaines après moi), ma propre boite mail restait désespérément vide. Chaque jour, chaque heure, chaque minute, je me languissais devant ma boite de réception : quand allais-je recevoir le fameux message m’indiquant que ma « super commande » était en route ? Les jours passaient, interminables, me plongeant dans un abîme de désespoir (pas si romantique qu’Anne veut nous le faire croire). Jusqu’au jour où, n’y tenant plus, j’ai contacté Monsieur Toussaint Louverture, éplorée d’impatience … pour apprendre que ma commande était passée entre les mailles du filet, cette petite impertinente ! Fort heureusement, Monsieur Toussaint Louverture a réagi plus vite que l’éclair et a sauvé en deux temps trois mouvements mon petit cœur à bout de souffle : deux jours après, Anne était enfin à la maison ! Et le soleil est enfin revenu, quel soulagement !
Désormais licenciée en lettres, Anne Shirley-Cuthbert, fiancée à Gilbert Blythe, a été choisie pour devenir la nouvelle proviseure du petit lycée de Summerside. Après une recherche des plus infructueuses, elle finit enfin par trouver une pension pour les trois prochaines années : la voici domiciliée à Windy Willows, une maison des plus romantiques appartenant aux « veuves », Tante Kate et Tante Chatty, et dirigée d’une main de fer par l’intransigeante Rebbeca Dew au grand cœur. Installée dans la « chambre de la tour », en compagnie du chat Dusty Miller, Anne est fort pressée de rencontrer ses collègues, ses nouveaux élèves, ainsi que tous les habitants de la petite bourgade … Mais il semblerait que la « Famille Royale », les Pringle, lui en veuillent terriblement d’avoir été choisie à la place d’un membre de leur Clan : derrière leurs grands sourires et leurs salutations des plus cordiales, les Pringle lui ont déclaré la guerre, bien décidée à la faire craquer et démissionner au plus vite. Mais c’est fort mal connaitre Mademoiselle Shirley : Anne ne renonce devant aucune difficulté ! Plus lumineuse que jamais, la jeune professeure écrit longuement à son fiancé pour lui raconter les joies et les peines de sa nouvelle vie à Windy Willows … en attendant qu’ils soient à nouveau réunis, dans la « maison de leurs rêves ».
Qu’il nous semble loin, le temps où notre petite Anne était encore cette enfant insouciante et effrontée qui faisait les quatre-cent coups à Green Gables : la voici devenue une jeune femme aux grandes responsabilités. Proviseure d’un lycée, rien que cela ! Et fiancée, qui plus est ! Et pourtant, au plus profond d’elle-même, Anne est restée exactement la même : elle est toujours ce petit rayon de soleil qui réchauffe les cœurs et les âmes de tous ceux qui ont la chance de faire sa connaissance. Elle est restée cette petite fille au cœur tellement plus grand qu’elle, cette petite fille déterminée à aimer le monde entier si le monde entier le lui en donnait l’occasion : Anne ne cherche rien d’autre qu’à offrir son amour, son amitié, en abondance, à volonté même. Anne donne, sans chercher à recevoir en retour. Et ce qu’Anne donne, c’est elle-même, et c’est sans doute le don le plus précieux … Elle donne sa douceur à la petite Elizabeth, privée d’affection depuis son plus jeune âge, elle donne sa fraicheur à Katherine, aigrie par une vie difficile. Et personne, pas même la ronchonneuse Rebecca, pas même les veuves les plus acariâtres de la bourgade, pas même les pères de famille les plus impétueux, pas même l’homme le plus ronchon de Summerside, pas même les mères les plus tyranniques, absolument personne ne peut résister à cet amour débordant : comment ne pas aimer Anne en retour, alors qu’elle donne sans compter ? Si seulement notre pauvre monde était rempli d’Anne, il serait tellement plus beau !
C’est d’ailleurs une autre grande qualité de notre chère Anne : elle ne voit que le meilleur, que le plus beau, que ça soit dans le cœur de chacun ou dans chaque situation, y compris les plus désespérées. Là où la tentation serait grande de se laisser abattre par les difficultés, Anne puise du réconfort dans toutes les petits bonheurs du quotidien. Dans un formidable coucher de soleil à l’orée de la colline, dans les malentendus et les quiproquos les plus emberlificotés (surtout s’ils terminent bien), dans un « rayon de sourire » (ne me demandez pas ce que c’est, ça m’est venu spontanément, et j’ai trouvé ça fort joli, alors je l’ai écrit). Anne prend la vie comme elle vient, tout simplement. Et on se rend compte que la vie peut avoir de si jolies choses à offrir, si tant est qu’on la laisse faire ! Car quoi qu’elle fasse, où qu’elle aille, Anne tombe inévitablement toujours sur des personnes hautes en couleur, des personnes un peu fantasques mais ô combien attachantes, inoubliables. Sa vie aurait-elle la même saveur, sans une Hazel inconstante, sans une Cousine Ernestine « qui a bien peur que », sans une Madame Raymond et ses jumeaux infernaux, sans un Cyrus Tailor et ses bouderies légendaires … sans une Mademoiselle Minerva et ses lugubres histoires dans sa lugubre demeure ? Parfois tragiques, souvent cocasses, toujours touchantes, les rencontres d’Anne sont de véritables péripéties à elles toutes seules, nous rappelant qu’il suffit parfois de toquer à une porte pour découvrir un nouveau monde … nous rappelant que la plus palpitante des aventures, c’est peut-être la vie, tout simplement.
La vie, tout simplement : telle est aussi l’intrigue de ce roman. Car finalement, il ne se passe rien de si « extravagant » : Anne travaille, est invitée à diner, se promène, est invitée à des mariages, va garder les enfants d’une voisine … Que des situations parfaitement banales, en somme ! Mais qui se voient comme sublimées, comme auréolées d’une étincelle nouvelle, lorsque c’est Anne qui les vit … et plus encore lorsque c’est elle qui les décrit, dans les nombreuses missives à son cher et tendre que nous avons l’immense honneur de pouvoir lire (du moins les extraits les moins … romantiques, allons-nous dire). L’humour d’Anne, jeune femme espiègle mais jamais cruelle, ajoute du piquant à toutes ces petites péripéties du quotidien … car Anne sait rire de tout, y compris et surtout d’elle-même, là où beaucoup auraient tendance à s’apitoyer sur leur sort, à se morfondre allégrement de leur petit malheur. Anne, quant à elle, prend le parti d’en rire, et d’en faire rire : elle prend visiblement un grand plaisir à relater à Gilbert toutes ces drôleries qui ne cessent de lui arriver, tous ces malentendus qui fleurissent inévitablement autour d’elle. Tout comme nous, le futur médecin doit vraiment avoir le sentiment de vivre par procuration ces trois années passées à Summerside, à tenter de se faire accepter par le Clan Pringle, à tenter de redonner le sourire à cette pauvre Elizabeth, à tenter de solutionner les soucis de tout à chacun, car Anne ne peut pas s’empêcher de chercher à rendre tout le monde heureux autour d’elle. Si certains ont été perturbés par toutes ces lettres, j’ai pour la part eu le sentiment d’être soudainement plus intime encore avec Anne, mon amie de papier …
En bref, vous l’aurez bien compris : sans surprise, ce fut encore une fois un fabuleux, un merveilleux, un prodigieux coup de cœur ! Retrouver Anne, c’est se sentir enveloppée de douceur, de joie, de rêve : c’est comme rentrer dans une petite parenthèse enchantée, loin de la lourdeur et de la grisaille du quotidien. On se sent comme protégé de tout ce qui cherche à nous blesser, comme préservé de tout ce qui pourrait nous affliger : Anne est là, avec son bonheur à couper le souffle, avec sa bonté à soulever des montagnes, et sa seule présence est comme un baume au cœur, comme une barrière contre les assauts du monde extérieur. Le plus difficile, c’est bel et bien de la quitter : si seulement Juin (et non pas Demain, comprendront ceux qui connaissent la petite Elizabeth) était déjà là ! Comment survivre à cette si longue attente, alors que chaque jour sans Anne semble plus long encore que le précédent ? Monsieur Toussaint Louverture, vous qui savez faire des livres aussi sublimes (je passe littéralement des heures à les admirer, et j’ai déjà l’intention de leur offrir une place de choix dans ma future bibliothèque), vous qui retrouver les commandes égarées en un claquement de doigt, pourriez-vous, je vous prie, inventer une machine à compresser le temps, histoire que nous puissions découvrir « la maison de rêve » d’Anne au plus vite ? Car Anne ne me contredira sans doute pas, elle qui aime tant les envolées lyriques et tragiques : sans manches bouffantes nouveau tome d’Anne, la vie ne vaut pas la peine d’être vécue !