Morbius : de vampire en pire chez sony ?

MORBIUS : DE VAMPIRE EN PIRE CHEZ SONY ?
Il n'est pas facile de se motiver pour aller voir un film, lorsque les premières critiques sont déplorables et le présentent comme une catastrophe industrielle, équivalent cinématographique de ce que peut-être l'accident de Fukushima pour l'environnement. Malgré tout, n'écoutant que notre courage et l'abnégation professionnelle, nous sommes aller regardé ce Morbius, qui en effet souffre d'un nombre évident de tares, mais n'est probablement pas aussi désastreux que ce qui était craint au départ. Il faut certes bien comprendre de quoi il s'agit : un personnage mineur de l'univers Marvel, que quasiment personne dans le grand public ne connaît, et qui de surcroît est toujours dans le giron de Sony, qui a la réputation de faire à peu près tout et n'importe quoi avec les personnages qu'ils sont censés porter à l'écran. Si le mètre étalon de Morbius c'est Venom ou Venom 2, clairement, le film est réussi; si par contre il s'agit de faire une comparaison avec ce qui existe de l'autre côté du miroir, c'est-à-dire des Marvel studios, il y a de quoi être bien déçu. Nous parlerons ici d'une origin story, c'est-à-dire que tout est énoncé, en commençant par l'enfance de Michael Morbius, puis ses études brillantes, en passant par son nouveau statut de star de la recherche dans le domaine du sang (il a mis au point un sang synthétique qui a sauvé bien des vies). Un parcours formidable, si ce n'est que Morbius souffre depuis toujours d'une grave maladie dégénérative, pour laquelle il n'existe pas de remède. La solution serait peut-être de mettre au point un sérum miracle à partir de l'ADN de chauves-souris vampires, mais jusqu'ici les expériences sur les petits rats de laboratoire ont toutes échoué. Bien évidemment, le jour où pour la première fois le succès est au rendez-vous, s'enclenche l'inévitable catastrophe à venir, c'est-à-dire des essais sur l'humain. Le docteur lui-même sera son propre cobaye. En parallèle, le film nous propose un second personnage d'importance, Milo/Steven, atteint d'une maladie plus ou moins semblable, et qui est devenu au fil des ans le meilleur ami de Michael Morbius. Ils se sont rencontrés très jeune à l'hôpital et depuis leurs liens ne se sont jamais desserrés; l'un est donc devenu un génie dans son domaine; l'autre un richissime homme d'affaires qui joue au philanthrope et finance les recherches de l'ami qui lui sauvera peut-être la vie, quitte à s'affranchir des lois. Vous l'aurez compris le sérum va être bel et bien mis au point, mais il y aura des effets secondaires absolument délétères : celui qui s'en sert devient une sorte de vampire vivant, plus à entendre dans le sens d'un homme chauve-souris d'ailleurs, que dans le sens de cette créature un peu baroque qui vit la nuit et dort dans un cercueil le jour. 
MORBIUS : DE VAMPIRE EN PIRE CHEZ SONY ?

Autre problème majeur ici, la nécessité d'absorber du sang pour rester dans une forme physique éblouissante, être capable de bondir, réagir à la vitesse de l'éclair, planer sur les courants aériens, posséder une sorte de sonar, d'écho pour localiser les objets et personnes en mouvement dans l'espace... Comment passer de moribond incapable de marcher ou presque, à créature qui ferait passer Spider-Man pour une limace empotée? En échange de tout cela, un aspect physique effrayant, et une soif de sang qui devient incontrôlable, au point que le liquide synthétique mis au point par Morbius ne suffit plus, et qu'il faille aller se servir directement à la jugulaire de malheureux innocents. Disons-le franchement, les dons spéciaux de Morbius et de son ami/ennemi Milo, sont largement exagérés, et un peu plus de retenue et de pathos n'aurait pas été de refus. Dès lors tout le reste du film va se dérouler sur la base de cette dualité : deux vampires aux antipodes, le premier qui décide de résister à sa condition et conserve une certaine éthique, le second qui évacue une vie entière de frustration en s'affranchissant de toute règle morale et en se comportant comme un criminel à la énième puissance. Ce choix est finalement assez logique car il permet de présenter Morbius comme un personnage certes loin d'être héroïque, mais pas suffisamment corrompu pour être considéré comme un vilain. Le public peut le prendre en pitié et le lecteur de comics retrouver son anti-héros pathétique et maudit. Jared Leto, à défaut d'être extraordinaire, ne cabotine pas autant que ce que nous pouvions craindre au départ; c'est plutôt son compère (Matt Smith) qui en fait des caisses, un peu à l'image de ce qu'avait pu faire Woody Harrelson dans le rôle de Carnage (du Jim Carrey sans sucre). La seconde partie du film est donc beaucoup moins inspirée, très convenue, et se contente d'empiler les scènes de combat, d'agression, de morsures. On aboutit donc à un final aussi peu lisible que dans beaucoup d'autres films du genre, quand tout explose et les coups pleuvent, et qu'on finit par se croire devant une console, un joystick à la main. Ne quittez pas tout de suite la salle, car cette fois-ci vous avez droit à deux scènes bonus, étonnamment rapprochées l'une de l'autre (quelques secondes); la première permet de comprendre ce qu'est devenu Michael Keaton, annoncé comme présent dans le film, et qui en réalité ne pointe le bout de son nez qu'au terme des dernières images. Sans vouloir vous spoiler le contenu de ces deux scènes, si vous n'avez pas vu Morbius, sachez que la première est difficilement crédible et que la seconde est carrément ignoble, entre incohérence et choix moraux radicalement opposés à tout ce qui a précédé durant le film. On a l'impression que Sony tente un coup de bluff sans même savoir ou finiront les dés et comment va se poursuivre la partie... ça oscille entre le désopilant et le déconcertant. Au final, nous avons un film qui n'a rien de guerre passionnant mais qui, nous le répétons encore une fois, est loin d'être ce qui s'est fait de pire dans le genre. 

MORBIUS : DE VAMPIRE EN PIRE CHEZ SONY ?