August, Callan Wink, traduit de l’américain par Michel Lederer, Albin Michel, Collection Terres d’Amérique, 2022, 380 pages.
D’emblée, je me suis sentie chez moi, dans les phrases de Callan Wink, son univers m’était familier (et pas seulement parce que j’avais lu ses nouvelles), j’étais bien, avec cette envie de ne pas quitter August, d’aimer le regarder vivre, grandir, comprendre, se perdre, se retrouver, hésiter.
D’une nouvelle nommée Les respiriens, dans son excellent recueil Courir au clair de lune avec un chien volé, Callan Wink a déroulé l’histoire de ce jeune adolescent, qui va suivre sa mère dans le Montana.
Il tuait des chats pour se faire un peu d’argent dans la nouvelle, il deviendra un très bon footballeur, puis il travaillera dans une ferme sans compter ses heures, il apprendra à danser, il se soulera, il aimera, il se bagarrera, il donnera de temps en temps des nouvelles à ses parents sans leur raconter grand-chose de sa vie. Ça ne parait pas bien enthousiasmant, en le racontant comme ça.
Et pourtant !
Ce roman je l’ai dévoré à grandes lampées sur certains passages, je l’ai dégusté à petites doses sur d’autres pour finir par engloutir les cent dernières pages d’une traite. Pas de suspense, pas d’événements majeurs (peut-être un événement marquant par sa violence et qui va déstabiliser August…). Mais sinon, rien de tout ça. En revanche, une ambiance, une sincérité, une authenticité. La difficulté pour August de se lier aux autres, sa manière d’appréhender sa vie, sa quête personnelle, ses rencontres, tout est captivant. Je le répète, je me suis sentie extrêmement bien à naviguer entre les actes du quotidien du personnage, ses maladresses, sa fragilité et en même temps sa détermination.
Roman initiatique, roman d’un adolescent un peu perdu dans une Amérique qui vient de subir les attentats du 11 septembre, roman d’un amoureux de la nature, qui n’hésite pas à travailler tous les jours dans un ranch au bout du monde. Une vraie grande réussite. Simple et efficace. J’en redemande.
« August avait la sensation que son existence était désormais divisée en deux parties distinctes : celle dans laquelle Skyler était en vie et où son père, sa mère et lui vivaient ensemble dans la nouvelle maison, et celle d’aujourd’hui où tout baignait dans un brouillard confus. Alors qu’il enroulait autour de sa fourchette les spaghettis préparés par la jeune femme, il prit soudain conscience que la totalité de sa vie jusqu’à cet instant précis existait dans le passé, ce qui signifiait peut-être qu’elle n’existait pas du tout, ou du moins pas vraiment. Elle aurait fort bien pu être enterrée dans le pré à côté de son chien. »
Merci aux éditions Albin Michel pour l’envoi de ce roman.