Tout garder de Carole Allamand

Par Isa S.



Éditeur : Anne Carrière
Parution : 26/08/2022
Nombre de pages : 192
Genre : enquête, 
témoignage
L'auteure :
















Née à Genève en 1967, Carole Allamand vit entre le New Jersey, où elle enseigne la littérature française, et Aix-en Provence. Tout garder est son cinquième livre.
Quatrième de couverture :
Quand sa mère décède subitement, Carole Allamand rentre en Suisse pour s’occuper de ses funérailles. Une longue absence a distendu leurs rapports et plus de dix ans se sont écoulés sans une visite à son domicile. Rien ne l’a préparée à ce qu’elle découvre. Objets et déchets ont envahi tout l’espace, englouti les meubles, retiré aux pièces leur fonctionnalité, confiné sa mère dans moins de cinq mètres carrés. Comment en est-elle arrivée là ?Quelle signification ces choses ont-elles eue pour elle, et pour ces gens qui ne peuvent s’empêcher de les accumuler ?Tout garder est une enquête sur le syndrome de Diogène, ce mal mystérieux et fascinant des sociétés dites avancées. Il est aussi un témoignage intime, un plaidoyer pour les femmes de sa génération, un roman d’amour.
Mon avis :
« Il faut franchir une première colline pour arriver au salon. Nicole me tend la main et je pénètre pour ainsi dire de plain-pied dans la folie de ma mère. On regarde ça, longtemps, comme un paysage pour la première fois, comme la surface de Mars, le tsunami de 2004, Berlin année zéro. C'est un raz-de-marée qui file entre les mots. Nous sommes bien au-delà du désordre. Bazar, bordel, foutoir ne conviennent pas davantage à un lieu qui relève de la décharge publique et du cabinet de curiosités, du nid de pigeon et de la jungle. »
Suissesse installée aux Etats-Unis depuis de nombreuses années, l'auteure se voit contrainte de revenir dans son pays natal, afin de régler les funérailles de sa mère Nelly, décédée soudainement. Une génitrice à la personnalité énigmatique qui a toujours fait preuve d'indifférence envers celle qui était pourtant sa fille unique. Mère et fille entretenaient des relations dénuées de liens affectifs, naviguant entre distance et incompréhension. Seuls quelques rares échanges téléphoniques maintenaient entre elles le fil ténu d'une relation quasi inexistante.Chargée de vider l'appartement de cette dernière, l'autrice va avoir le choc de sa vie. Elle ne va pas reconnaître l'appartement dans lequel elle a passé ses jeunes années et découvrir avec stupeur que sa mère souffrait du syndrome de Diogène. Le logement totalement insalubre est d'une puanteur intolérable. Il est colonisé d'objets hétéroclites montant jusqu'au plafond et de déchets en décomposition et grouillant de vers, cette dernière ayant conservé jusqu'à la dépouille de son défunt chat. L'autrice se demande comment cette mère méconnue a pu en arriver là. Elle va se lancer dans une véritable enquête, cherchant vainement à découvrir qui était sa mère et ce qui a bien pu l'amener à rejoindre le triste rang de ceux qu'elle préfère nommer les gardeurs. Revisitant ses souvenirs d'enfance, elle se souvient de l'alcoolisme de son père, méprisant et humiliant sa mère. De la folie de cette dernière, laminée par les électrochocs, qui se réfugiait dans les souvenirs de son premier et unique amour, un libanais que les circonstances de la vie l'empêcheront d'épouser. Mêlant histoire intime et recherches plus générales dans tout ce qui a pu être écrit concernant ce trouble du comportement complexe, l'autrice nous invite à découvrir une pathologie qui a de quoi nous laisser perplexes… 
"Tout garder" est un témoignage tout aussi effrayant qu'édifiant. Bouleversant de sincérité, sans pathos, avec beaucoup de lucidité et moult détails, Carole Allamand tente de nous éclairer à travers sa quête personnelle sur cette singulière pathologie, encore méconnue, qu'est le syndrome de Diogène.Qui peut être concerné ? Comment en arrive-t-on là ? Pourquoi ?Beaucoup de questions et encore peu de réponses à ce jour. D'où l'intérêt de se pencher sur ce récit éclairant qui ne peut manquer de nous interroger !