Les affranchis jardiniers - une reve d'autarcie

LES AFFRANCHIS JARDINIERS

UN REVE D'AUTARCIE

ANNICK BERTRAND-GILLEN

AFFRANCHIS

Un témoignage unique d'une vie en quête d'autarcie, qui fait de plus en plus envie et sens

Il y a près de quarante ans, on les prenait pour des marginaux.


Aujourd'hui ils sont considérés comme des précurseurs. Eux, pourtant, n'ont pas changé ! Quand Annick Bertrand et Yves Gillen se sont installés dans ce qui deviendra " Les Jardins du Marais ", au nord de Saint-Nazaire, leur but était de dépendre le moins possible de la société de consommation, de s'en affranchir, tout comme s'affranchissent, dans le langage jardinier, les greffons de leurs porte-greffes, en créant leurs propres racines.


Ils ont appris à se nourrir des produits de leur jardin, en respectant la nature, ils ont utilisé parmi les premiers les énergies solaire et éolienne, ils ont adapté leurs besoins à ce qu'ils pouvaient produire, ils ont construit leur maison avec ce qu'ils ont pu récupérer ici et là toujours avec le souci de préserver l'environnement et d'embellir leur cadre de vie !


Voici le témoignage d'une quête d'autarcie, avec les contraintes mais surtout la liberté que ce mode de vie procure.

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J'ai eu la chance de voir une vidéo document sur le couple formé par Annick Bertrand et Yves Gillen sur YouTube. Cette vidéo je l'ai regardée, pfiou je sais pas, genre 20 fois! Autant dire que j'en étais dingue. Non pas qu'elle racontait quelque chose d'extraordinaire, deux personnes qui vivent depuis des décennies comme on vivait "autrefois", dans une maison construite de bric et de broc, des petits revenus, le potager pour se nourrir, le refus de la surconsommation. Rien vraiment. Mis à part une sérénité incroyable. Cette vidéo m'a beaucoup aidé lorsque je sentais venir un coup de blues, un ras le bol de la vie de folie que nous avons tous.

Tout du long de la vidéo (dont je ne vous mettrais pas le lien dans ce billet, la vidéo a été supprimée il y a peu)(arghhhhh!), on voit Annick Bertrand s'affairer aux tâches de la maison, et se réserver des moments pour écrire. Son projet : un livre. Qui raconterait leur cheminement, leur quotidien, leur jardin. Les images de la vidéo ont été tournées (de mémoire) il y a genre vingt ans. En 2020, je me suis demandé si finalement, elle l'avait écrit oui ou non son fameux bouquin la Annick! Alors j'ai cherché sur internet. Première (bonne) surprise : oui, elle l'a écrit. Deuxième (mauvaise) surprise : Annick est décédée. Je ne vous cache pas ma tristesse. Alors bien sûr je ne la connaissais pas du tout, mais après avoir vu la vidéo autant de fois que je l'ai vue, eh bien on s'attache.

Alors, j'ai acheté le livre. Les affranchis jardiniers. Sur Momox hein, je n'allais pas faire l'affront à l'auteure de l'acheter neuf sur un site marchand hyper controversé.

L'ouvrage que j'ai reçu (rapidement et en bon état, sans vouloir faire de pub pour Momox) était une ré-édition. La première édition datait de 2009, la seconde de 2019, entre les deux, Annick est décédée, et Yves a donc fait un truc que je trouve extraordinaire. Lui qui apparemment ne s'occupe que de son jardin, son potager, et absolument pas d'écriture, Yves a pris sa plume et a écrit en préface une magnifique lettre d'amour à sa femme. Du moins, moi je la trouve magnifique.

Passons au livre en lui-même. Le style d'Annick est un peu alambiqué, elle a des tournures de phrases un peu compliquées, c'est pas le truc le plus fluide à lire. Bon, après avoir vu la vidéo vingt fois, moi j'y suis habituée à son style, donc après 5 - 6 minutes d'adaptation, ça va tout seul. Elle a du vocabulaire. C'est appréciable. Se laisser bercer par la valse des mots d'Annick, c'est entrer en ce jardin dont elle parle si bien.

Comment avec Yves, ils ont décidé à la fin des années 60 de ne pas se laisser embrigader par la société. Métro boulot dodo, c'était pas pour eux. Comme elle le disait si bien dans la vidéo "la consommation est une aliénation", pas question d'entrer dans ce système ô combien destructeur et néfaste à l'homme. Ils ont passé quelques années sur les routes, en roulotte, avec très peu de possessions, très peu de revenus, ainsi que finalement, peu de besoins. Cette vie leur allait très bien. Mais au début des années 70, Corinne, la fille d'Annick a eu 5 ans. Il fallait la scolariser. Alors le couple nomade s'est trouvé un lopin de terre, un demi marécage, qui au fil des années, des amendements du sol et du talent des deux, a fini par devenir l'oasis qu'il est maintenant : les jardins du Marais.

Le jardin comme cadre de vie, le potager pour se nourrir. Semer, planter, soigner et récolter. Ca a l'air simple dit comme ça. Mais ça ne l'est pas. Annick en témoigne dans ces (ses?) pages. On ne s'improvise pas jardinier! Que de galères! Que de foirades! Mais quand au final ça marche, quelle fierté... Et quelle leçon également, car on ne cultive pas un marais comme on cultive une autre terre. Quelques inondations, et tout est à recommencer. On comprend vite que l'homme n'est rien face à la nature. Tout ça nous est raconté tranquillement, mine de rien, et pourtant, on sent derrière le nombre incroyable de galères qu'ils ont dû surmonter pour continuer à vivre selon leur idéal. Cela aurait été tellement plus facile de dire ben on va aller bosser à l'usine et vivre en pavillon en banlieue, on se cassera moins la tête et surtout les reins. Franchement, cela force l'admiration.

Le livre parle également de la transmission tranquille aux petits enfants. Les valeurs données. Le bonheur d'être ensemble à partager.

Bonheur également partagé avec qui veut bien venir leur rendre visite. Ils ont ouvert leur jardin au public. Et comme dit Annick, au début on les prenait pour des dingues, maintenant ils sont avant-gardistes.

Personnellement, ça m'a beaucoup inspiré niveau jardinage. J'ai genre 30 mètres carré derrière ma maison, j'ai voulu jouer à la potagiste! Et comme Yves et Annick, j'ai semé, planté, soigné... et pas trop récolté! Hey, on ne s'improvise vraiment pas du tout du tout jardinier. Mes semis de carottes n'ont pas levé, mes radis ont poussé mais ils piquaient affreusement, mes salades ont fait le régal des limaces. J'ai réussi à avoir deux tomates. Qui ont fini par moisir. Hé! J'étais tellement heureuse d'avoir eu quelque chose de comestible dans mon mini potager, qu'au lieu de les manger ces tomates, j'ai préféré passer mon temps à les regarder! Je sais, c'est nul. LOL

Le gros plus de ce livre? Les photos! Bon sang, je suis dingue de ces photos! Elles sont ma-gni-fiques! Et je vous dis ça avec tout ce qu'il faut de petites étoiles dans les yeux. L'ambiance, les couleurs, les détails. Je ne m'en lasse pas. C'est incroyable. Moi je vis avec deux enfants turbulents et un mari plutôt brocanteur fou qui récupère tout et n'importe quoi. Vous jetez un oeil sur mon intérieur, c'est le souk, un bazar phénoménal sans queue ni tête, on a juste envie d'appeler une benne devant la maison et de tout jeter. Le jardin? pareil!!! Chez Annick et Yves, c'est aussi la fête à la brocante et à la récup, mais c'est miraculeux, tout se marie, tout va bien, on a juste envie de se poser avec un bouquin et de cocooner. On dit que Yves est un artiste? C'est vrai. Même si le trip hippie soixante-huitard ne vous intéresse pas plus que ça, même si le côté stop à la surconsommation ça vous emmerde, même si mettre les mains dans la terre et essayer d'en sortir de quoi vous nourrir, ça aussi ça vous passe bien au dessus des oreilles, franchement, ce bouquin, achetez-le juste pour les photos. Il en ressort une zénitude incroyable, une force sereine, ou une sérénité forte si vous préférez.

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