William Butler Yeats (1865-1939) est un poète et dramaturge irlandais. Fils du peintre John Butler Yeats, il est l'un des instigateurs du renouveau de la littérature irlandaise et il recevra le prix Nobel de littérature en 1923. Yeats fut aussi un sénateur de l'Etat libre d'Irlande pendant deux mandats. Si Yeats est mondialement connu pour sa poésie, on le sait moins, mais il écrivit un seul roman, John Sherman (1891), qui vient d’être traduit.
Ballah, une petite ville de province en Irlande. John Sherman, trente ans, oisif et rêveur de nature, vit avec sa mère. Une vie simple faite de jardinage, de lectures et de pêche à l’anguille. Il a une amie d’enfance, Mary Carton, fille du pasteur, qui « appartenait à un type de femmes qui, dans les bourgades rurales, ne trouvent pas à se marier : leur beauté est dépourvue du teint frais de rigueur. » Amis sans plus, d’ailleurs les commères du coin se sont lassées de ne pas voir évoluer la situation. Il fréquente aussi William Howard, un jeune vicaire, pas fait pour ces bleds où la pensée est étroite, mondanités et lumières étant plus à son goût et adaptées à ses talents. Deux caractères diamétralement opposés, donc.
Et puis un jour, son oncle lui propose un poste dans son entreprise de courtage en transport maritime, située à Londres. John hésite mais sur les conseils de Mary (le pense-t-elle réellement ?), il accepte et déménage avec sa mère dans la capitale. Il y fera connaissance de Margaret Leland, riche et jeune femme très courtisée qui s’entiche de ce rustre et tente de le dégrossir, tant et si bien qu’ils se fiancent.
Mais on n’échappe pas à sa nature profonde…
J’aurais pu dire qu’étonnamment c’est un très bon roman alors qu’il ne s’y passe pour ainsi dire rien, mais je retire vite fait « étonnamment » car ma longue expérience de lecteur m’a déjà prouvé que ce soi-disant « vide » ne présume en rien de la qualité d’un bouquin.
Le livre est court, l’écriture sans gras aucun, aucun détails superflus où parfois une pointe d’humour (britannique ?) affleure. John Sherman traverse la vie presque avec indifférence, comme un bouchon sur l’eau, il laisse les choses se faire, peine à prendre des décisions importantes. Au final l’expérience londonienne ne sera qu’une simple parenthèse dans sa vie, un fait à peine marquant pour lui, si ce n’est qu’il reviendra au pays, comme Ulysse vivre le reste de son âge… ayant enfin compris où et avec qui, résidait son bonheur.
Une très belle lecture.