Le faiseur de mort - Olivier Henskens ♥♥♥♥♥

Publié le 25 décembre 2022 par Nathalie Vanhauwaert

 Le faiseur de mort    -    Olivier Henskens  ♥♥♥♥♥





















Lilys éditions
Parution : 08 octobre 2022
Pages : 266
Isbn : 978-2-39056-024-1
Prix : 22.50 €
Présentation de l'éditeur
Un juge parisien perd pied face à la lente agonie de son grand amour. Déchiré entre la loi qu’il a servie toute sa vie et les demandes de sa femme, qui ne peut plus souffrir, son existence se noie, entre remord et douleur. Jusqu’à ce qu’il pense trouver son salut.
L’euthanasie est au cœur de ce second roman. Mais Le Faiseur de mort, c’est aussi l’histoire d’un amour inconditionnel et de sa perte, l’histoire d’un homme qui affronte seul le crépuscule de sa vie dans une société où il ne fait pas bon vieillir
Olivier Henskens












Copyright Photo: Claudia Benedetto

Olivier Henskens est né le 11 septembre 1981 dans la région du Centre. Aujourd’hui Namurois et attaché parlementaire, cet ancien journaliste, amoureux des mots et des rencontres confie que depuis l’âge de six ans, il ne peut s’endormir sans lire au moins une page de roman.
Son premier roman "le roi mort" a été publié chez Lilys éditions en 2020

Mon avis
C'est le second roman d'Olivier Henskens.  Un roman fort, poignant, abordant un sujet brûlant : l'euthanasie.
Cela fait huit mois que notre narrateur, un juge parisien à la retraite vient chaque jour dans cette chambre d'hôpital. regarder l'amour de sa vie s'en aller.
Nous sommes en novembre 2004, cela fait plus de 50 ans qu'il vit le grand amour avec Gisèle qui sur ce lit d'hôpital lutte contre un cancer en phase terminale.  Il a 74 ans, elle va partir, et lui, il va vivre !
C'est insupportable !
A la première personne il nous raconte et se plonge dans ses souvenirs, au temps où il était étudiant à la Sorbonne, 55 ans plus tôt, le temps de la rencontre, le début d'une grande histoire d'amour, d'une belle vie à deux.  Bravant tous les obstacles, le bonheur les a accompagné toute leur vie jusqu'à la maladie de Gisèle.
Devant l'agonie de son amour, il est déchiré entre la demande de sa femme qui l'implore de la laisser quitter ce monde et la loi qu'il a servi toute sa vie.  Il ne cesse de repenser à Gilles Latouche, un de ses jugements, l'euthanasie n'est pas un droit.  Douleurs et remords, dilemne entre l'amour et la loi, décision compliquée, problème de conscience.
Dans la seconde partie, les remords le rongent de plus en plus.  Un couple d'amis, les François qui les a accompagné toute leur vie est présent pour l'aider à remonter la pente mais un événement va se produire, un point de bascule..  Il commencera à poser des actes qui le libèreront, lui sembleront juste, lui apportant pour un temps sérénité et quiétude.
Vous l'aurez compris, l'euthanasie est au centre de ce récit.  Olivier Henskens a construit ce roman de main de maître.  L'écriture est fluide, addictive.  La lecture est rapide, agréable, première partie lue d'une seule traite.  On change de genre pour la seconde partie, c'est la difficulté de la perte de l'être aimé qui est abordée, le questionnement de la fin de vie dans des conditions difficiles et la nécessité soudaine d'agir.  La frontière entre la légalité et le culpabilité est mince tout comme le sentiment de victime et coupable, entre malaises et remords, que faire ?
Beaucoup de réflexions intéressantes sur la justice et l'évolution de notre société.  Ce roman est passionnant, captivant, je vous le conseille vraiment.  Un talent à suivre.
Ma note : 9.5/10
Les jolies phrases
J'ai tué mon amour à force de ne pas vouloir la tuer.
Pourquoi la sauver ? Pour qu'elle passe encore des mois dans cette pièce, en se réveillant pratiquement plus? J'ai mal.  Cet espoir est tellement douloureux, c'est tellement dur d'accepter qu'il faut laisser partir l'être que l'on aime le plus au monde... Mais il y a trop longtemps que je viens ici chaque jour.  Trop longtemps que je lis dans ses yeux cette souffrance qu'elle tente de me cacher. Trop longtemps que je dois, à intervalle régulier, supporter cette attente dans le couloir, sans savoir si, en rentrant dans la pièce, j'embrasserai ma femme ou son cadavre. 
De toute façon, pourquoi aurais-je dormi ?  Le sommeil sert à ceux qui veulent s'évader, s'extraire de la morosité de leur existence. 
Qu'est-ce que ça pouvait bien faire qu'un de nous deux ne pouvait avoir des enfants ?  Si je ne pouvais pas en avoir, elle ne pourrait en avoir non plus ! Voilà qui suffisait largement à nous anéantir.
Á quoi ma vie pourrait-elle bien servir désormais ?  Pourquoi le travail, pourquoi amasser de l'argent ?  Quel est le but de la vie si rien ne la prolonge ?  J'allais vivre, mourir, et il ne resterait rien de moi ... De la poussière inutile dans un caveau vide.
Mais l'appareil judiciaire n'a-t-il pas pour objectif d'assurer le bien être des citoyens? Les lois, les peines n'ont-elles pas pour but d'assurer au peuple de vivre heureux ensemble ?  Peut-on encore parler de justice quand on force quelqu'un à vivre dans la misère, sans autre objectif que la douleur d'exister ?  N'est-il pas plus juste d'aider les gens à ne pas souffrir ? 
Les beaux discours politiques sur la fin de vie digne, sur l'aide des drogues pour éviter les souffrances peuvent voiler la face de ceux qui n'ont jamais mis les pieds dans un service palliatif.  Ils ne tiennent plus la route quand vous avez, une seule fois, senti les odeurs d'urine et de merde, entendu les hurlements des patients, quand vous avez passé une seule fois le seuil d'un de ces lieux sordides.  Quelle dignité peut-on espérer rendre à un légume ?