Tout d’abord, Michel Chevallier est l’auteur du roman intitulé Rome est une femme. Il s’agit du premier livre de l’écrivain. L’intrigue se déroule dans la capitale italienne, réputée pour son romantisme et son Histoire fascinante… Un patrimoine riche, que l’on a du mal à imaginer sous l’emprise de Mussolini. L’Italie et le fascisme forment un duo paradoxal : avec un peuple bon vivant, pieux et souvent passionné, embrasser la soumission à l’autorité ultime semble incohérent. L’enquête décrite dans ce livre prend place en 1935, à l’époque où le Duce envoie ses troupes pour envahir l’Éthiopie. L’Etat doit alors prouver sa supériorité auprès des pays frontaliers, avec lesquels il entrera en guerre. Il faut dire qu’avec un rival comme Adolf Hitler, le chef de l’Italie a tout intérêt à asseoir son pouvoir, afin de se tenir à côté des plus puissants. 

Cesare Accardi : jeune policier en quête de vérité

Sous l’aile du commissaire Gaetano, le héros de cette affaire est un débutant. Pour ce tout premier cas, Cesare doit se confronter à une vision troublante. Une jeune et belle fille a été retrouvée, dénudée sur une plage. Tuée par un monstre, l’identité du meurtrier est un mystère. Pour le protagoniste, cette découverte dépasse l’entendement. Tout d’abord, il s’agit pour lui de son premier émoi sensuel et sexuel. Très attiré par ce corps féminin riche en courbes et qui semble doux, Cesare développe un fétichisme vis-à-vis de la défunte qui décontenance. Puisqu’il a été élevé dans la piété romaine, l'enveloppe charnelle des fidèles appartiennent à l’intimité. C’est donc obsédé par la victime que Cesare se lance dans le grand bain des affaires criminelles, tandis que le pays subit le fascisme et l’autorité de Mussolini. Grâce à des personnages crédibles, Michel Chevallier retranscrit une intrigue brillante, qui semble tout droit sortie d’une véritable enquête. 

Un voyage initiatique et une course intense

Au-delà de l’aspect « policier », l’auteur a insufflé un sous-texte subtil et très fin, où le symbolisme est primordial. Ainsi, le voyage intérieur de Cesare connaît de nombreuses tempêtes. Lui qui est tombé amoureux de Vantona ne pourra jamais se marier avec elle, puisqu’elle est décédée. En parallèle, son amie semble tout à fait impuissante face à la nouvelle obsession de son proche. Ce flic grandit et apprend les désillusions d’un système qui se vante d’être parfait, idéal et sans aucune bavure. Finalement, les apparences sont importantes et les hautes sphères sont protégées par l’autorité. Petit à petit, Cesare se confronte donc à des situations d’injustice qui l’enragent. Progressivement, l’enfant se mue en jeune homme en colère, en soif de vérité. Hors de question pour lui de céder à la facilité, car il donnera tout ce qui est en son pouvoir pour mettre la main sur le coupable, même si cela signifie « se mettre en danger »

Des rebondissements ponctués de frustrations

Michel Chevallier a le don pour capter l’attention de son lecteur, susciter l’indignation et surtout jouer avec ses attentes. Pour cela, il balance quelques indices subtils qui permettent à chacun de tisser une théorie autour du marionnettiste, qui agit dans l’ombre. Certains éléments surprenants sont traités, y compris lors d’une scène particulière, mettant en avant une séance de spiritisme. En ressort un cocktail au délicieux goût d’interdit, où Cesare cherche à s’infiltrer avec ou sans l’autorisation de ses supérieurs, persuadé qu’il doit poursuivre l’enquête afin de sauver l’âme de celle qu’il croit aimer… Petit à petit, le lecteur se retrouve face à de solides doutes : cette enquête connaîtra-t-elle une véritable fin ? Est-ce que le nom du tueur sera seulement dévoilé ? 

Rome est une femme sensuelle

Cesare et Gaetano forment un duo attachant, qui tranche drastiquement avec les autres individus, qui souhaitent entrer dans les faveurs du Duce. Pour cela, tout est bon : corruption, violences, pression psychologique, rejet et discriminations en tous genres. Afin de susciter l’empathie, l’auteur a donc décidé de peindre deux personnages principaux qui ont une éthique et une morale. Pourtant, ses protagonistes ne sont pas d’une blancheur immaculée, surtout pour Cesare qui explore sa propre sexualité « grâce » à l’enquête, en découvrant notamment le corps nu de Vantona, assassinée sur la plage. En proie à une vraie torture, il se demande s’il a seulement le droit de fantasmer sur cette image idéalisée. C’est ainsi que le mystère derrière le titre se dévoile : la Rome de 1935 est une femme martyre, mutilée et magnifique… 

Un final explosif !

Grâce à un style précis et abordable, Rome est une femme est une réussite. Le premier roman de Michel Chevallier joue avec la narration, en glanant le doute, tout au long des chapitres fluides. Le lecteur enchaîne les pages avec passion, souhaitant à tout prix découvrir qui est le meurtrier de Vantona. Qu’il se méfie, car les théories déployées sont sans doute fausses. Difficile de prédire l’issue de ce roman policier bien ficelé, où toutes les intrigues sèment le trouble et donnent un excellent aperçu de l’Histoire de l’Italie, pendant la période de l’entre-deux-guerres. Alors, prêt à partir à la chasse à l’homme ? 

Le site de l’auteur : http://michel-chevallier.com/