Dans Moi et François Mitterand, le narrateur est féru de correspondances épistolaires et de préférence avec les présidents de la République française en exercice voire antérieurs. Avec ses lettres, il dévoile un peu de sa vie privée, ses déboires avec Madeleine, et se galvanise à chaque retour de missive présidentielle, en se glorifiant de si illustres amitiés.
Moi et François Mitterand est un court écrit qui donne la pêche, et est plus subtil qu'il n'y paraît. Exercice de style à part entière, il propose un double fictif de l'auteur complétement azimuté, qui joue dans touts les registres (familier, recherché, outré...) suivant la personne à laquelle il s'adresse.
Lire Moi et François Mitterand permet une revisite des règnes de Mitterand, Chirac, Sarkosy et Hollande, mais en version people, règnes marqués par des affaires (de coeur) ou des anicroches politiques, les moments qui ont marqué la vie de chacun.
Hervé Le Tellier ne nous épargne pas et c'est avec un plus grand bonheur : rares sont les écrivains qui arrivent à me faire éclater de rire en cours de lecture et lui, avec espièglerie, il y arrive par deux fois (cf les paroles fantastiques de ses futurs hits musicaux Début et Garde-moi ... rien que d'écrire ces titres, je glousse encore !)
À travers Moi et François Mitterand, je confirme mon inclinaison littéraire à apprécier la plume d'Hervé le Tellier : tout me plaît chez lui: son érudition humble (il poursuit sans le vouloir peut-être la digne trajectoire d'Alain Rey, linguiste formidable), son humour et son autodérision chaleureuse (il n'hésite pas à prêter son identité à un huluberlu fantastique), son irrévérence politique tout en restant profondément démocrate et respectueux des symboles républicains. Mine de rien, il brosse l'évolution sociétale de la France plus encline (maintenant et malheureusement) à accepter et à valoriser davantage toutes les formes de populisme.
Tel un oulipien, Hervé Le Tellier s'impose une contrainte littéraire et varie les différentes modes d'interprétation faisant basculer la situation dans l'absurde. C'est brillant. Reste qu'à la longue, une forme de monotonie s'impose, malgré l'humour, malgré la diversité des présidents, malgré le verbe alerte. Hervé le Tellier a fait le bon choix de limiter le nombre de pages.
Quelques images : un slogan publicitaire sourire aux lèvres (je garderai longtemps en tête son "Fun être"), une liste de personnalités révélées dans le Point et le regret de l'auteur de ne pas y être concerné... Délicieusement révoltant !
Lu suite au super avis de Cathulu (merci, merci, merci)
Du même auteur : : L'anomalie - Assez parlé d'amour - Toutes les familles heureuses - Cher Père Noël (du collectif OuLiPo)