Pour vous, Mesdames ! La mode en temps de guerre

Par Bénédicte

Éditions Libel, 2013 (96 pages)

Ma note : 14/20

Quatrième de couverture …

« J’avais coupé cette jupe dans le pantalon de mon père, j’avais fait ce sac en ficelle, j’avais utilisé de la grosse toile pour faire des chaussures. J’avais deux jupes, une robe et pas davantage, avec ça on arrivait quand même à être élégante. »
Jeanne, adolescente à Lyon pendant la guerre.

L’évocation de ces prouesses restitue de façon quasi immédiate, avec les chaussures à semelles de bois et le trait sur la jambe imitant la couture du bas, tout un pan de la vie quotidienne des Françaises entre 1939 et 1945. Bien loin de la légèreté supposée du sujet, la mode et le vêtement représentent un enjeu culturel et économique important pendant la guerre.
Bénéficiant des contributions d’historiens et d’historiens de la mode, fort d’une iconographie inédite qui révèle les trésors cachés des collections publiques françaises, l’ouvrage ambitionne de rendre compte de l’énergie déployée par toutes les femmes pour continuer à se vêtir avec élégance, malgré les restrictions et les difficultés. Il dresse aussi, en filigrane, l’image sociale de la femme et son évolution dans cette période si particulière.

Mon avis …

Il y a quelques années déjà, je vous faisais part de mon coup de cœur pour La mode des années 20 en images (un beau-livre publié aux éditions Eyrolles). Je trouve l’histoire de la mode absolument passionnante. En plus de nous faire voyager dans le temps, elle se fait témoin de toute une époque ; nous permet de toucher du doigt l’atmosphère des rues, l’évolution du statut de la femme dans notre société mais aussi l’économie de tout un pays. C’est donc un sujet beaucoup moins futile qu’on pourrait le penser à première vue.

Pour vous, Mesdames ! La mode en temps de guerre est le catalogue d’une exposition qui s’est tenue à Lyon, entre novembre 2013 et avril 2014, au Centre d’Histoire de la Résistance et de la Déportation. Il est ici question de l’histoire du vêtement pendant la Seconde Guerre Mondiale à l’heure où restrictions et tickets de rationnement (en plus de toutes les atrocités vécues au cours de cette période) étaient plus que d’actualité.

J’ai passé un bon moment en compagnie de ce beau-livre richement illustré et ce, même si je suis quelque peu restée sur ma faim en termes de contenu. Les photographies et croquis de mode offrent une vraie plus-value à l’ensemble. Nous découvrons également les témoignages de Denise, Jeanne et Jeannette (âgées de 12 à 17 ans au moment de la déclaration de guerre en 1939) qui humanisent les propos de cet ouvrage. On apprend par exemple qu’il était fréquent de se teindre les jambes (les bas nylon n’existaient pas encore) et d’y ajouter un trait pour imiter les bas couture ; qu’on possédait souvent une unique paire de chaussures avec des semelles en bois ; ou encore que lorsqu’un vêtement était trop usé, on se débrouillait comme on pouvait (en le retournant pour lui offrir une nouvelle vie, ou en conservant le tissu pour créer un sac ou un autre habit). Plutôt intéressant, donc !

Ce beau-livre vient normalement compléter une expérience de visite, ce qui vient sans doute expliquer ce pourquoi il est loin d’être exhaustif. C’est peut-être le seul point négatif à mes yeux. J’en attendais davantage avec plus de textes, ainsi qu’un découpage différent en termes de chapitres (même si des ponts nous sont ici proposés avec le monde du cinéma et des séries en lien avec cette période de l’Histoire). Les lyonnais apprécieront sans doute de leur côté retrouver des photos d’époque de leur ville (souvent réalisées sous l’Occupation) ainsi que toute une partie consacrée à la soierie lyonnaise et à la haute couture.

En bref, si je suis passée à côté du coup de cœur, cette lecture aura au moins réussi à piquer ma curiosité en me donnant envie d’en apprendre davantage sur le sujet. Pour vous, Mesdames ! La mode en temps de guerre semble être une lecture à réserver aux petits curieux, autrement dit à toutes celles et ceux qui souhaitent découvrir (via une première approche) l’histoire du vêtement de 1939 à 1945.

Ci-dessous : Marie Claire, Mai 1944 N°311 ; partition Elle avait des semelles en bois (Henri Alibert, 1941).