Marcel Aymé : Brûlebois

marcel ayméMarcel Aymé (1902-1967) est un écrivain, dramaturge, nouvelliste, scénariste et essayiste français. Ecrivain prolifique, il a laissé deux essais, dix-sept romans, plusieurs dizaines de nouvelles, une dizaine de pièces de théâtre, plus de cent soixante articles et des contes. Il a également écrit de nombreux scénarios et traduit des auteurs américains importants : Arthur Miller (Les Sorcières de Salem), Tennessee Williams (La Nuit de l'iguane). Brûlebois publié en 1926 est le premier roman de l’écrivain.

Le roman débute le 11 novembre 1918 dans une petite ville de province jamais citée mais on peut facilement imaginer qu’il s’agit de Dole en Franche-Comté sans que ce soit très important. Marcel Aymé introduit les principaux personnages de son roman : Hector Reboudin, une figure locale considérée menant une vie aisée mais en conflit permanent avec son épouse ; ils ont un fils, Charles, un adolescent ; Beudot cousin jovial d’Hector et Rodolphe, autre cousin, illuminé délirant mystique ayant créé une nouvelle religion encore discrète. Et puis il y a la Lune, « notoirement pauvre, il passait ses journées à la pêche » il vit dans « un immeuble lépreux, une espèce de cave divisée en deux compartiments » et enfin Brûlebois, jadis sous-préfet, tombé en déchéance suite à une rivalité amoureuse avec un plus puissant que lui, aujourd’hui « il le sait bien qu’il est un ivrogne, un saoulot, un déclassé, un propre à rien » qui n’a qu’une idée en tête, gratter trois sous comme porteur de bagages à la gare pour se payer ses litres de vins.

Si ce premier roman est très fréquentable, ça reste un premier roman et même si j’en ai aimé la lecture, j’ai trouvé sa composition étrange. Le ton est à l’humour discret bien que le sujet ne soit pas particulièrement amusant, un pochetron pathétique dont on suit les derniers jours de sa vie ! Et autour de ce thème, les acteurs précédemment cités vivent leurs petites vies, elles-mêmes pas franchement désopilantes, les Reboudin en viennent à se haïr et dans un final carrément comique (?) vont se livrer à un sprint au coude à coude dans une guerre de l’asthme, à celui qui va mourir le premier pour avoir le dernier mot ! Quant au fiston, il va se lancer dans une liaison vouée à l’échec avec une jeune voisine néanmoins déjà veuve deux fois… Restent Brûlebois et son ami la Lune qui le soutiendra jusqu’à la fin, compagnons de misère, et cette belle scène finale où notre héros mourant à l’hôpital quémande une bouteille au prêtre venu lui apporter les derniers sacrements.

Conclusion, si la construction m’a un peu dérouté, ce roman propose de savoureux portraits de personnages secondaires, les prémices de ce que l’on retrouvera souvent dans les autres romans de Marcel Aymé, des déclassés, indésirables mais néanmoins sympathiques, assumant pleinement leur mode de vie.