Hugues Pagan, né en 1947 en Algérie, est un écrivain et scénariste français. Ayant obtenu une maîtrise de philosophie, il enseigne à Gérardmer dans les Vosges. En 1968, il met fin à sa carrière dans l'enseignement et exerce divers métiers (journaliste, attaché bancaire, photographe pour un journal local avant de passer le concours d'inspecteur de police, profession qu’il exercera durant 23 ans. Il est désormais auteur de romans policiers depuis 1982 ainsi que scénariste de films et de séries de télévision. Les Eaux mortes, est un roman paru en 1987.
Jacques Cavallier, ex-flic reconverti en pigiste dans un petit journal de province tombe des nues quand son banquier l’informe qu’un inconnu a déposé une très grosse somme d’argent sur son compte. Dans le même temps, Sonia son ex-épouse, l’engage pour retrouver Chess, un ancien ami à lui ayant mal tourné. Beaucoup d’évènements improbables en si peu de temps, ça sent l’embrouille pour Cavallier. On peut même dire que ça pue.
Autant prévenir les futurs lecteurs, si nous sommes bien dans un polar ou mieux un roman très noir, ce n’est pas le genre de bouquin où le lecteur se creuse les méninges pour tenter d’en démêler l’épilogue avant la fin, pour une raison toute simple, l’intrigue est particulièrement difficile à suivre et même à comprendre, à se demander si l’écrivain lui- même en a fait sa priorité.
Donc, c’est pas terrible comme roman ? Faux ! C’est ce qui fait la grande force de cet auteur. D’un bout à l’autre du récit j’ai été emballé – mais ce n’est plus une surprise pour moi, par l’écriture, le style de l’écrivain. Une écriture dense, mêlant aussi bien l’argot de l’époque, que des mots rares (inactinique) ou des répliques à la Michel Audiard (« Vous vivez comme une betterave, c’est entendu, mais vous avez failli caner comme une grosse légume ! »)
Pour en revenir rapidement sur le récit, notre Cavallier est un classique héros désabusé et usé par ce qu’il a vu et vécu dans la police, supportant avec difficulté sa reconversion suite à un acte légal mais moralement lourd. Le personnage féminin, car il en faut toujours au moins un, se nomme Anita, plus jeune que notre Jacques, bossant dans le même canard et plus hardie et entreprenante que le faux vieil homme… qui se contentait jusqu’à ce jour de son amour immodéré pour sa Ford et sa passion pour le jazz. L’épilogue qui conclut cette intrigue tournant autour d’un trafic de drogue, est optimiste et j’avoue que ça m’a énormément surpris au vu du ton général de l’ouvrage.
Une fois encore, et je le redirai à chaque fois que je chroniquerai un bouquin de Hugues Pagan, rien que pour son style, lisez au moins l’un de ses livres car ça vaut le déplacement.
« Alors, Sonia était revenue. Elle m’avait plus ou moins supplié de retrouver Chess. Sauvage, lui, avait fait irruption sur mon lieu de travail, afin de me conseiller amicalement de n’en rien faire. Il était reparti avec la photocopie du rapport caviardé. Ah et oui : les dix bâtons ! Et Zimmer, mon généreux mécène, le bordereau apocryphe… Prends l’oseille et tire-toi. C’était un beau titre de cinéma, mais il n’y avait que dans certains films qu’on s’en tirait, et pas tous, encore. »
Hugues Pagan Les Eaux mortes Rivages/Noir - 296 pages -