Amande – Won-Pyung SOHN

Par Lamouche

Amande
Par
Won-Pyung SOHN
Chez Pocket Jeunesse (PKJ)

Yunjae, 15 ans, n’arrive pas à ressentir les émotions. Son amygdale cérébrale, son «amande», ne fonctionne pas bien. Alors, pour se fondre dans la masse, il doit retenir les codes de la société comme les tables de multiplication : imiter les autres quand ils rient, dire bonjour, s’il te plaît, merci quand il faut… Paraître «normal», en somme.
Quand une tragédie bouleverse sa vie, il se retrouve seul face à l’adversité.
Contre toute attente, Gon, un garçon de son âge rebelle, colérique et violent, s’intéresse à lui. Entre eux naîtra une amitié improbable qui permettra à Yunjae d’expérimenter ses premières émotions. Mais devenir plus humain et s’ouvrir aux autres a un prix…


Une couverture magnifique, un synopsis prometteur, un personnage portant une maladie peu connue, un best-seller d’un pays dont je n’ai encore jamais rien lu… autant vous dire que j’ai sauté sur Amande lorsque le livre a croisé mon regard en librairie.

L’alexithymie, la maladie que possède Yunjae, est une difficulté voire une impossibilité à identifier et exprimer ses émotions. Elle est souvent présente chez les autistes ou les fols en général. Un diagnostic d’autiste lui a pourtant été dénié (même, si en tant que concerné, Yun coche quand même pas mal de cases, dont les intérêts spécifiques). Gon n’a pas vraiment de diagnostic, tout l’histoire étant du point de vue de Yunjae, mais il se rapprocherait des troubles borderline où la gestion de la colère est compliquée. Sans même poser de diagnostic, Gon a simplement eu une vie de merde, grandissant sans cadre véritable et donc sa colère est tout à fait compréhensible.
Won-Pyung Sohn réussit justement à nous véhiculer toute la difficulté que ressent Yun (ou qu’il ne ressent pas, plutôt) et le chaos de Gon par ses mots sans pour autant glamouriser ou encore faire ressentir de la pitié au lecteur.

Sa plume est vraiment brillante, dénudée d’émotions. Nous sommes dans la tête de Yun, Yun qui galère avec les émotions. La narration est descriptive, annonçant des faits et uniquement des faits. Un show don’t tell brillamment réussi !
Le cerveau reste un organe étrange, bien souvent malléable. Si la mère de Yun lui donnait des amandes dans l’espoir que la sienne s’agrandisse, la pratique montre souvent des changements tout bonnement impressionnants. C’est ce que le mentor de Yun lui propose lorsque ce dernier commence à s’inquiéter de sa situation. L’amitié, le sens de l’injustice, l’amour… ce sont des choses qui s’apprennent, finalement. Certains d’entre nous partent un peu en retard sur la poste de courses, mais ca arrive et ce n’est pas grave.

Won-Pyung Sohn nous offre un roman grandiose, avec des personnages tous attachants, tous différents et pourtant tous si réels. Amande est un roman que j’imaginais contemplatif et pourtant, je n’ai jamais été autant pris par les rebondissements qu’il nous présente, par l’apprentissage long mais nécessaire de Yun. Je recommande ce ouvrage vivement !