Une fois n'est pas coutume, nous revenons parler bouquin par ici à l'occasion d'une Masse Critique Babelio. Aujourd'hui on vous parle (brièvement on espère) de Légendes et Lattes de Travis Baldree.

Bon, on va pas passer par 4 chemins. On va se calmer et TOUT DE SUITE sur les Masse Critique Babelio. A chaque fois c'est presque un échec et on se retrouve à écrire un article de blog ultra négatif parce qu'on s'est engagés à écrire une chronique et qu'on a plus vraiment le choix.

Donc disons le de but en blanc. Nous n'avons pas aimé Légendes & Lattes de Travis Baldree et nous en sommes les premières bien dégoutées.

On en attendait pas énormément de ce livre mais disons que le moral n'étant pas toujours au beau fixe ces derniers temps, on voyait en ce livre un petit univers douillet, un peu à la Becky Chambers mais version fantasy. Et on s'est carrément fourvoyées, faut bien le dire.

Bon sinon, tu vas nous dire de quoi ça parle ?!

Oui oui, on accourt.

Pour celles et ceux qui me connaissent un tout petit peu au moins, vous vous doutez que ce livre m'a IMMÉDIATEMENT tapé dans l'œil. Grande amatrice de livres réconfortants où ils ne se passent pas grand-chose et autre tranche-de-vie dans lesquels on suit des personnages aux passions les plus improbables au monde dans leur quotidien (on a regardé des anime sur la poterie et sur la pêche, juste pour rappel...), je me devais de lire Légendes & Lattes. On me vend une histoire dans laquelle tout repose sur l'ambiance douillette et sur la création d'un petit café, je n'en demandais pas mieux. Oui mais y a un hic... Enfin, y en a même plusieurs !

On aime les tranche-de-vie, mais un tranche-de-vie avec autant de redondances dans les thèmes, ça nous a un peu ennuyées. L'ouvrage consiste à suivre Viv dans la création de son café, on la voit ajouter UN A UN les différents éléments de son menu, plat par plat, découvrons l'origine de chaque boisson présente au menu, etc. Et sinon on assiste aussi à quelques scènes de bricolage, réparations et ajout de fours et autres matériels de cuisine dans le café et... C'est tout ! Et nous bah, ça nous a ennuyées. On est trop habituées aux histoires courtes de Minuscule, de Yotsuba et compagnie où, même sans qu'il y ait toujours de morale très profonde, les personnages ont un projet ou font une découverte différente à chaque historiette. Là, absolument tout tournait autour du café sans qu'il n'en devienne beaucoup plus palpable en même temps.

Un récit pas assez évocateur à nos yeux

C'est aussi cela qu'on attendait de ce livre. Qu'il nous fasse bêtement nous évader, nous transporte dans un petit cocon douillet, nous donne envie, nous aussi de nous délecter d'un bon petit café dans un coin du lieu qu'a créé Viv. Au lieu de ça, les scènes de bricolage nous ont donné l'impression de lire une retranscription de l'émission D&CO et les scènes évoquant nourriture, boisson et scène de liesse ne m'ont pas fait me sentir dans ce café avec tous les personnages. Ajoutez à cela le fait que je n'étais pas attachée aux personnages dont je me moquais un peu de l'avenir ...Parce que c'est ça aussi la différence avec les autres tranche-de-vie que j'ai lus. Normalement dans un tranche-de-vie tu dois avoir des personnages ultra-attachants et incarnés, suffisamment incarnés pour que tu aie envie de lire des histoires où ils cuisinent juste des cakes aux olives. Et là c'était clairement pas le cas. Vous commencez à voir le tableau. Je n'ai pas passé un très bon moment et finir le livre m'a demandé un gros effort tant je n'y voyais que peu d'intérêt...

La traduction, mes aïeux, la traduction !!!

Si on a bien réalisé un truc, c'est aussi que la raison pour laquelle on a autant aimé Becky Chambers et qu'on a pas du tout aimé Travis Baldree, c'est parce que l'un sait visiblement écrire et l'autre n'est pas un très grand auteur (on le suppose uniquement). Enfin, on ne va pas s'avancer de trop, on l'a lu en traduction et il faut bien le dire, la traduction est parfois un peu à côté de ses pompes au point où encore maintenant on essaye de comprendre le sens de certains passages. En voici deux exemples, très concrets :

" Le hob se poussa un peu du col et Viv était certaine de l'avoir vu lutter pour ne pas sourire [...] "

Légendes & Lattes, Travis Baldree, Ynnis éditions, 2023, p.81

Ou encore :

" Comment on dit déjà ? Ils ont appliqué la loi à la lettre, mais sans en respecter l'esprit ? L'esprit n'était pas éveillé. "

Légendes & Lattes, Travis Baldree, Ynnis éditions, 2023, p.199

Vous comprenez mon embarras quand j'ai compris que j'allais à nouveau devoir mal parler de la traduction d'un bouquin, mais là franchement ce serait de la malhonnêteté que de ne pas soulever ce problème qui me semble flagrant... Et encore, on va vous passer la scène où Bouton, le rat cuisinier du café, rapporte à notre protagoniste une " gâterie " (p. 258). Certains soucis de traduction nous ont fait rire, où nous ont semblé minimes (typiquement la coquille de la traductrice qui a hésité avec deux traductions possibles et qui a laissé un morceau de l'une et de l'autre), mais les deux exemples qu'on vous a cités nous ont paru absolument lunaires.

Enfin, on va pas tirer sur l'ambulance 107 ans. Pour résumer... Légendes & Lattes nous a déplu pour ses faiblesses scénaristiques se cachant habilement sous une couche de " cosy fantasy " ( cosy ne veut pas dire creux, pour rappel), pour l'écriture plate et l'aspect attendu de ce récit qui nous a un peu donné l'impression de regarder un téléfilm M6 le dimanche (mais si, vous savez, le téléfilm avec Brian qui décide de revenir dans sa petite ville natale de Heavensbury pour monter son restaurant et doit faire face à la pègre locale mais est, heureusement, sauvé par son amie d'enfance qu'il aime en réalité depuis toujours), pour sa traduction, souvent ras les pâquerettes et pour l'incapacité de l'auteur à nous glisser dans cette ambiance qu'il a essayé de créer.

Est-ce qu'on arrête de lire de la cosy fantasy pour autant ?

Bien sûr que non. Si ce " genre " prend de l'ampleur depuis quelques années, c'est qu'il fait réponse à un besoin. Un besoin qui est le nôtre souvent, et le vôtre peut-être aussi. Un besoin qui consiste à s'évader doublement. S'évader une première fois dans un univers imaginaire, que ce soit dans de la SF, de la fantasy ou du fantastique. S'évader une seconde fois en voyant des personnages dont le quotidien n'est pas toujours facile et simpliste mais qui, malgré tout, font leurs petites vies et vivent des choses parfois banales mais ô combien importantes pour maintenir une vie saine et comportant quelques onces d'espoir... Un truc qui nous sorte du monde angoissant au possible dans lequel on vit depuis 2020 et qui n'a de cesse de le devenir encore un peu plus chaque jour...

C'est pourquoi on espère que ce " genre littéraire " a de longs jours devant lui, que Becky Chambers sera une inspiration pour une tripotée d'auteur.ices. Que les livres nous proposant des avenirs enviables mais pas dénués d'intérêt pour autant se multiplient. En somme, on espère lire pleins d'autres Légendes & Lattes mais qui mettrons la barre un peu plus haut, stylistiquement, narrativement et en termes d'écritures de personnages !

S'en est fini de cette chronique absolument épouvantable. Une vraie torture à écrire parce qu'on en a marre de descendre des livres ici. On se retrouve prochainement, on l'espère, et cette fois-ci pour vous parler d'un livre qu'on a aimé, voire adoré, qui sait !