Michelle Lapierre-Dallaire – Y avait-il des limites si oui je les ai franchies mais c’était par amour ok ***

Par Laure F. @LFolavril

Le Nouvel Attila - janvier 2023 - 156 pages

*

" Je suis née pour qu'on m'abandonne. "

À 27 ans, la narratrice a déjà connu plusieurs morts. Deux dents en moins, elle a déjà pris de la coke et éprouvé son corps de mille et une façons. C'est une jeune femme qui a la peur de l'abandon rivée au coeur, elle est tempétueuse et sans limite, ses émotions débordent sans cesse, prenant d'incroyables proportions. Elle cherche à tester les limites de son propre corps, éprouver ses contours, parce qu'utiliser son corps semble être un des seuls moyens qu'elle a pour communiquer avec les autres.

" J'oscille entre le grotesque et la beauté. (...) Je suis insurmontable. Indomptable. Trop atteignable, je n'ai pas de peau, pas d'armure pour me protéger. Le bruit, les gens, tout ce qui est matière à toucher me brûle, me pulvérise. " Pour vivre elle a besoin d'être excessive, fougueuse. Elle ne sait pas vivre autrement qu'avec folie. " Je ne sais pas comment faire pour rester en vie en étant aussi vivante. "

La vie ne l'a pas épargnée : une mère suicidée, un père en prison et un beau-père qui a abusé d'elle enfant. Et cet homme marié plus vieux dont elle tombe amoureuse, avec ses " yeux bleus de lac d'été ".

Je dois avouer que le style m'a un peu dérangée au début ; c'est trash, c'est provocateur, c'est même parfois franchement glauque. L'on rencontre une (anti) héroïne si torturée à laquelle j'ai eu du mal à m'attacher/m'identifier mais pour laquelle j'ai fini par éprouver une forte empathie - à travers ce qu'elle confie sur sa relation aux autres, au monde, ses émotions exacerbées, qu'elle ne contrôle pas, je finis par vaciller - la maladie mentale dont elle souffre, et dont sa mère souffrait, n'est jamais nommée (tdah?) C'est un récit criblé de violences, un véritable cri du cœur et du corps qui ne peut laisser indifférent, qui secoue, dont la lecture se révèle être une expérience singulièrement poétique.

" Les autres nous rappellent constamment l'ampleur des efforts qu'on doit maintenir, la corde raide sur laquelle on marche pour satisfaire les exigences sociales. "