Corinne Morel Darleux – La Sauvagière ***

Par Laure F. @LFolavril

Dalva - août 2022 - 139 pages

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" Je ne supportais plus la surabondance de choix et d'informations qui me bombardaient sans relâche, des écrans d'actualités aux salves de notifications. Je ne voulais plus des lumières criardes ni du bruit de la société, de cette normalité qui, comme je l'avais lu quelque part 'n'est rien d'autre que le délire accepté de notre relation au monde'. Cette phrase m'avait profondément marquée. "

Après son accident, une jeune femme se réveille dans une maison forestière, blottie au creux de la montagne, avec deux autres femmes : Jeanne et Stella. Elle s'y retrouve à l'abri de la violence sonore de la ville, de son tumultueux quotidien, dans un silence à la fois réparateur et surprenant. La nature bruisse autour d'elle. Personne aux alentours, à part la forêt profonde. Dans cette maison, ce trio de femmes prend ses marques, dans une étonnante symbiose, jouissant de la nature - Stella et sa folie aussi doucereuse qu'inquiétante, Jeanne et ses échappées nocturnes inexpliquées dans la forêt. À leurs côtés, elle reprend peu à peu vie... En même temps que les frontières deviennent étrangement poreuses entre rêve et réalité, humanité et animalité, sagesse et folie. Les événements étranges se multiplient. " Je me demande parfois si je ne suis pas en train de perdre contact avec la réalité. À moins que ce ne soit la réalité qui me fuit? "

La Sauvagière est un roman à l'écriture hypnotique, qui nous fait basculer lentement dans une atmosphère surnaturelle, à la fois inquiétante et soyeuse. Un récit empreint d'une langueur poétique, où la nature, omniprésente, semble prendre le pas sur l'humain, lentement le métamorphoser, lui intimer qu'il existe une autre façon de voir, de sentir, de respirer le monde, animale et instinctive. " Et le paysage à son tour me transforme, rendant ma course plus agile, mon endurance plus soutenue, mon odorat plus fin. Je l'inhale et le dévore, par milliards de molécules, à chaque inspiration. Il pénètre en moi, par chaque pore de ma peau, sédimente et modifie la qualité de mes organes. "