Lois lane : ennemie du peuple chez urban comics

LOIS LANE : ENNEMIE DU PEUPLE CHEZ URBAN COMICS
 Lois Lane est absolument tout, sauf une potiche destinée à servir de faire valoir pour son super héros de mari. Pourtant, elle a épousé Superman. Enfin, pour être honnête, elle a épousé Clark Kent, un journaliste à succès du Daily Planet, qui peut souvent apparaître un peu pataud aux yeux de ceux qui le fréquentent, mais qui en grand secret est le plus formidable super-héros de tous les temps. D'ailleurs, puisque personne n'est au courant normalement de la double identité de Superman, Loïs est en difficulté lorsque fait surface une photo volée la montrant en train d'échanger un baiser avec le kryptonien. Que voulez-vous, aujourd'hui il est bien difficile de cacher ce genre de choses, d'autant plus que Lois connaît les risques du métier. C'est une journaliste célèbre, elle ose mettre son nez là où les autres ne vont jamais et elle s'en prend même directement à la Maison Blanche, au point de se voir retirer son accréditation pour les questions-réponses avec la presse, au Capitole. C'est qu'elle est sur le point de soulever un scandale phénoménal, une affaire d'état qui risque de laisser des traces au plus haut niveau de la nation. Son enquête l'amène aussi sur les traces d'une collègue russe qui a été assassinée dans son pays, pour avoir là aussi vraisemblablement tenter d'approcher d'un peu trop près une vérité qui dérange. Notre journaliste intrépide s'est payée les services de Renée Montoya, qui est devenu la nouvelle Question depuis la disparition tragique (prétendue) de Vic Sage. Pourtant, ce dernier est de retour sur le devant de la scène et nous avons donc deux personnages différents avec le masque énigmatique de l'enquêteur, qui sont là pour faire progresser l'intrigue et protéger Loïs. Toute la première partie de l'album pose une série de questions pertinentes sur le rapport entre les citoyens et la presse, la capacité du journalisme de révéler au grand public des choses jusqu'ici cachées et une interrogation sur la véritable nécessité, la véritable envie de ce même public, de savoir les choses quand elles ne correspondent pas à ce qu'il souhaite entendre. Greg Rucka parvient à nous intéresser d'emblée avec un récit qui aurait pu apparaître austère mais qui sait aussi coller au plus près de ses personnages, mettre en avant leurs aspects humains, leur embarras, y compris dans des scènes un peu loufoques comme lorsque Loïs découvre sous la douche son fils Jon Kent et qu'elle le confond un peu trop rapidement avec son mari. Bref, on passe de la légèreté à la gravité la plus complexe et c'est un grand plaisir de tourner les pages de cette longue aventure en 12 épisodes.
LOIS LANE : ENNEMIE DU PEUPLE CHEZ URBAN COMICS

Concernant le personnage de Lois Lane en tant que tel, une fois de plus Yann Graf fait un excellent travail dans une préface qui vous permet de connaître ou de vous rappeler de l'essentiel, avant même d'aborder la lecture. Pour ce qui est de la dynamique de l'histoire, on retrouve tous les mécanismes qui régissent aujourd'hui le journalisme : à savoir la difficulté de faire exploser au grand jour un scandale d'état, sachant que les politiciens et les pouvoirs financiers sont prêts à tout pour vous faire taire, y compris les actes les plus inavouables. Cela peut aller des ragots, de la manipulation de l'information en elle-même, jusqu'à l'élimination physique. De plus, lorsqu'on gratte certaines affaires, on se rend compte qu'elles sont en réalité liées à la pègre ou à des intérêts supranationaux, qui sont ici parfaitement représentés par des associations comme le Léviathan. Une criminalité qui se hisse au-dessus des nations et dont les intérêts tentaculaires parcourent le monde entier. Lois est au centre de l'histoire mais sa relation avec Superman est aussi très importante : quand on vous menace et que votre mari est le plus grand super héros existant, même si aux yeux du public ce n'est pas le cas, il est forcément tentant de lui demander de prendre les choses en main, de taper sur quelques têtes. Sauf que non, en tant que journaliste indépendante et têtes brûlée, Lane ne souhaite pas que le super-héros se mêle des affaires de la presse. Elle prétend parvenir elle-même à la résolution de l'histoire et échapper à tous les pièges qu'on sème sur sa route. Comme aux yeux du monde entier son époux est un simple journaliste, cela n'est pas sans conséquence, y compris de l'avis de Renée Montoya, qui est pourtant sa garde du corps et co-enquêtrice attitrée dans cette histoire. Il y a même des moments où nous avons l'impression que celle-ci reproche clairement à Lois ce qu'elle pense être une affaire extra-conjugale, ou en tous les cas qu'elle n'approuve pas totalement son comportement. Rucka n'oublie pas d'égratigner une société américaine extrêmement puritaine où la perspective d'une tromperie au sein d'un mariage est souvent vécue comme une affaire bien plus importante qu'un scandale politique ou financier d'ampleur international. Encore une fois, c'est le public qui décide de la vérité qu'il veut lire ou entendre et ce type de potins est bien plus facile et croustillant à encaisser ! Le dessin est signé Mike Perkins et nous sommes face à des planches qui jouent dans la cour du style réaliste, avec une mise en couleurs particulièrement sombre, voire étouffante par endroits, qui contribue à souligner les méandres de l'enquête et l'opacité de l'investigation. Il y a une réelle attention aux visages, aux expressions, aux anatomie et l'ensemble est d'une qualité indéniable. Le tout forme un gros volume de douze épisodes d'un coup, qui se laisse lire à une vitesse folle et qui s'achève sur la constatation évidente qu'il est possible d'écrire de très bonnes histoires sur des personnages n'ayant aucun super pouvoir en apparence, mais qui dans les faits savent se comporter en héros fonceur, bien plus qu'un type engoncé dans un costume avec une cape. Lois Lane méritait vraiment ce type de projet.
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