Roman estival à la sauce américaine, Eté après été vous invite à suivre l’idylle de Mallory et Jack sur la superbe île de Nantucket.
“Même heure, l’année prochaine” C’est la seule promesse que Mallory et Jack peuvent se faire mutuellement. Alors que leur rencontre sonne comme une évidence, elle est aussi teintée de contradictions. Les deux tourtereaux savent dès le départ qu’ils ne se quitteront plus et en même temps qu’il leur sera impossible de vivre ensemble. A seulement 24 ans, Mallory s’est choisi une vie paisible dans un cadre bucolique sur l’île de Nantucket alors que Jack est promis à un bel avenir à Washington. Plutôt que de se séparer définitivement et de ranger leur idylle au rang des doux souvenirs de vacances, les deux amants se font la promesse de se retrouver chaque année chez Mallory, lors du week-end de la fête du travail pour vivre trois jours et trois nuits d’un amour sans nuages. Quoi qu’il arrive…
Aussi romantique que cela puisse paraître, cette promesse est en réalité le plus cruel des engagements que deux êtres qui s’aiment aussi profondément peuvent prendre. Car leur accord va plus loin encore : aucun contact n’est permis le reste de l’année, sauf en cas de nouvelle importante liée à des fiançailles, un mariage, une grossesse ou un décès.
Leur histoire est un arbre qui pousse – peu à peu les racines s’enfoncent dans la terre et un nouveau cerne de croissance se forme sur le tronc.
Dès lors, accepter de vivre trois jours d’un bonheur parfait c’est accepter en même temps de subir chaque année 362 jours d’une vie imparfaite car incomplète. Entre double vie assumée et renoncements multiples, chacun se composera une vie à partir de cette réalité.
Il y a de la beauté, de l’abnégation et en même temps de l’égoïsme dans cet engagement inspiré du film “Même heure, l’année prochaine” que les tourtereaux se repassent en boucle chaque année comme un rappel de leur serment. Jamais le bonheur n’aura côtoyé le désespoir avec une telle régularité, été après été.
En choisissant de commencer son histoire par la fin puis de remonter le fil du temps en consacrant un chapitre à chacun des vingt-huit étés qui ont jalonné l’histoire d’amour de Mallory et Jack, l’autrice démontre autant la folie de cette promesse que la solidité du lien qu’elle parvient à tisser. Et la question mérite d’être posée : Mallory et Jack se seraient-ils autant aimés dans une vie rythmée par un quotidien harassant ? Et si c’était la peur de voir leur histoire idéalisée ne pas résister aux affres de la vie domestique, qui les avait finalement amenés à faire ce choix incompréhensible ?
Il est là, il est bien là, c’est lui, il est de l’autre côté de l’étroite table, elle se couchera dans le même lit que lui ce soir, se réveillera à ses côtés demain matin. C’est un conte de fées. Une partie de Tu préfères ? Tu préfères un bonheur absolu de trois jours ou une relation durable mais ennuyeuse à longueur d’années ? Mallory a depuis longtemps choisi son camp.
L’histoire d’amour impossible de Mallory et Jack n’est pas sans rappeler celle de Sara et Jack (encore…) dans La poursuite du bonheur de Douglas Kennedy. Pour autant, le roman de Kennedy reste de loin mon préféré car j’y trouve une histoire plus cohérente, un fond historique passionnant et un sens dramatique qui force l’admiration. Kennedy est un merveilleux conteur d’histoire et malgré tout l’intérêt de son roman, Elin Hilderbrand ne parvient pas à recréer cette bulle de magie autour de ses deux amants. A cause d’un manque de subtilité dans l’écriture, de maladresses stylistiques, d’une recherche de complicité artificielle avec le lecteur à grands coups de “nous” assez mal amenés, l’autrice n’a pas réussi à me faire perdre pied pour plonger à corps perdu dans son histoire. Elle n’est pas la seule responsable d’ailleurs car le nombre invraisemblable de coquilles qui émaillent la version numérique de ce roman a aussi eu le don de me refroidir. J’estime qu’un éditeur de premier plan qui traite une traduction avec un tel mépris ne croit pas lui-même dans ce texte et dans son auteur. J’ai franchement été déçue à ce niveau par les éditions Les escales.
Toujours est-il qu’après quelques rapides recherches, j’ai découvert qu’Elin Hilderbrand vivait depuis trente ans sur l’île de Nantucket et qu’elle avait choisi son cadre de vie comme toile de fond pour ses derniers romans. J’ai été très sensible à cette ambiance de bord de mer aussi poursuivrai-je ma découverte de cette autrice avec Un été à Nantucket que je possède déjà. Rendez-vous l’été prochain.
L’ESSENTIEL
Eté après été
Elin HILDERBRAND
Traduit de l’américain par Alice Delarbre
Edité chez Les escales en GF
Publié le 02/06/2022 en GF
500 pages
Genre : contemporain, romance
Personnages : Mallory, Jack, Cooper, Fray, Leland, Ursula, Link, Kitty et Senior
Plaisir de lecture :
Recommandation : oui
Lectures complémentaires : les autres romans de l’autrice (Un été à Nantucket, Dernier été, Un été pour deux…), La poursuite du bonheur de Douglas Kennedy, Une vie entre deux océans de TL Stedman
RESUME DE L’EDITEUR
Printemps 2020. Quand Mallory Blessing meurt, c’est à son fils Link de s’occuper de ses dernières volontés. Il apprend qu’il doit convier Jake McCloud aux obsèques de sa mère. Link, qui avait une relation fusionnelle avec sa mère, n’a jamais entendu parler de cet homme. Il ne comprend pas pourquoi sa présence lui tenait tant à coeur.
Été 1993. Mallory vient d’hériter d’une petite maison sur l’île de Nantucket, à une centaine de kilomètres au sud-est de Boston. Elle y reçoit les amis de son frère pour son enterrement de vie de garçon, dont un certain Jake McCloud. Entre eux, le coup de foudre est immédiat. Ils passent un week-end inoubliable, coupés du monde, cachant leur idylle aux autres invités.
Mais Jake et Mallory savent que leur histoire d’amour est impossible. Ils se font alors une promesse : quoi qu’il arrive, et peu importe leurs vies de famille respectives, ils se retrouveront chaque été en secret à Nantucket le temps d’un week-end.
TOUJOURS PAS CONVAINCU ?
3 raisons de lire Eté après été
- c’est la lecture de plage par excellence
- l’été à Nantucket a l’air magique
- on voit défiler 30 ans de l’histoire américaine devant nos yeux (chaque chapitre est introduit par les faits ayant marqué cette année)
3 raisons de ne pas lire Eté après été
- si vous êtes plus branché rentrée littéraire que lecture estivale
- si vous êtes allergique aux mélodrames
- si vous resté bloqué sur la raison pour laquelle ces deux-là s’infligent une telle torture
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